Полине Виардо - Письма 1862-1864 - Мемуары и переписка- Тургенев Иван Сергеевич

31 января (12 февраля) 1864. Петербург

No 14

St-Pétersbourg.

Hôtel de France.

Vendredi, 31 janvier/12 février 1864.

Chère et bonne Madame Viardot, votre lettre n° 10 (et qui est en réalité n° 12) datée de Leipzig le 7 février m'est arrivée hier - et tout en me faisant un plaisir infini, elle m'a fait de la peine en me confirmant le fait de la disparition de quelques-unes de mes lettres. Je vous en ai écrit 5 à Leipzig (du n° 7 au n° 12) et jusqu'à présent vous n'en avez reèu qu'une1! - Celle que vous avez reèue était-elle adressée: "Ritterstrasse n° 4" ou bien: "zu erfragen im Gewandhaus"? Cela me cause d'autant plus de peine que toute réclamation faite ici n'aboutit à rien.-- Il faut se résigner à cette fatalité, qui semble ne frapper que mes lettres - car les vôtres me sont toutes arrivées heureusement!

NB. Cette lettre-ci, le n° 14, est la seconde que je vous adresse de nouveau à Bade.

A propos de Bade, j'ai reèu la lettre de Viardot, avec la missive collective des trois enfants.-- J'ai vu avec plaisir que tout va bien dans ce cher petit pays et que l'on s'y porte parfaitement. Louise va s'installer chez Mme Anstett dès le 15 mars! Je suis sûr qu'elle y sera aussi bien soignée que possible et que rien ne manquera pour l'aider à franchir le moment périlleux.-- Comme je compte revenir à Bade le 8 mars au plus tard - et que j'y resterai une semaine environ - je pourrai encore voir les deux époux avant de partir pour Paris. N'ayant pas d'occupations fixes, Ernest s'ennuiera un peu - je le crains - et je ne vois pas trop comment il dépensera son excédent d'activité; mais il aura de graves préoccupations - à quand l'époque de la naissance de votre petit-fils ou fille2?

L'album marche avec plus de lenteur que je ne le voudrais.-- Mme Abaza est tout à fait enthousiaste des "Mitter-nächtige Bilder"3; cela fait honneur à son goût et à son instinct musical. L'éditeur de l'album4 est un bredouilleur qui dit: Oui, oui à tout et qui a surtout l'air de ne douter de rien: je n'aime pas trop ces gens-là.-- Mais je lui mets l'épée dans les reins. Botkine n'est pas encore revenu de Moscou. Mais je l'attends de jour en jour.-- Je suis en train de négocier une nouvelle édition de mes œuvres: je ne m'attendais pas, je l'avoue, à ce que la précédente fût déjà épuisée et je tâcherai de ne pas me laisser voler comme l'autre fois5.

Cet argent viendra à point pour la noce... Mais aura-t-elle lieu, cette noce6?

Je suis obligé de ne pas trop sortir de chez moi: ma toux s'exaspère quand je respire un air froid.-- Du restei je vais très bien.

Je suis très heureux que le public de Leipzig vous apprécie et vous aime. Y a-t-il jamais eu une cantatrice ayant joué un morceau de piano dans le même concert? - On reèoit ici Г"Illustrierte Zeitung" et j'y guette l'article où l'on parlera de vous. Ce que vous me dites de Mme Niemann ne m'étonne pas; c'est une de ces natures du nord de l'Allemagne, que je connais - pur troppo et qui ne peuvent intéresser qu'un public honnête, civilisé et au fond vulgaire. Médiocre, froid et ingénieux - va te promener! - Tout ce que vous avez dit est excellent.-- Theuerste Freundinn, je sors pour chercher un passeport.-- Envoyez-moi, s'il vous plaît, les nos de mes lettres que vous avez reèues? - Devinez quel est le vieux bonhomme dont je vous envoie la photographie7.-- Il se met à vos pieds et dit mille choses à tout le petit monde.

Der Ihrige

J. T.

Иван Тургенев.ру © 2009, Использование материалов возможно только с установкой ссылки на сайт