Полине Виардо - Письма (Апрель 1864-декабрь 1865) - Мемуары и переписка- Тургенев Иван Сергеевич

3 (15) апреля 1864. Париж

No 14

Paris.

rue de Rivoli, 210.

Vendredi, 15 avr 1864.

Pas de lettre aujourd'hui, chère et bonne Madame Viardot! Et pourtant vous aviez promis de me donner aujourd'hui vos commissions! L'événement si attendu aurait-il eu enfin lieu1? Peut-être aurai-je un télégramme dans la journée. En attendant, je me prépare déjà à partir.

Hier soir, Mme Delessert a conduit ma fille et moi à "Mireille"2. Cette bonne dame avait pris une baignoire - pour faciliter au jeune homme la conversation3. En effet - il s'est approché - sa place était tout près dans l'orchestre - et il a causé. Ma fille gardant aujourd'hui et hier soir en rentrant un silence obstiné, je ne puis savoir 1 impression qu'il a pu faire. J'avoue du reste que je m'en Préoccupe médiocrement: c'est son affaire à elle - et maintenant que ces dames vont avoir un appartement Permanent à Passyj elles feront ce que bon leur semble4. De mon côté, j'ai déclaré que je ne dépasserai pas d'un sou la rente que j'ai fixée.

L'impression de "Mireille" ne change plus pour moi: ce qui est charmant reste charmant - ce qui m'a paru faible - me fait le même effet. L'attitude du public est à la glace - on ne bisse plus rien du tout - on n'applaudit pas - et il y a déjà pas mal de places vides. Si Gounod ne fait pas de grands changements, voilà un opéra très remarquable destiné à périr6.-- Et ce misérable "Lara"6 qui triomphe sur toute la ligne! Je vous apporterai pourtant la chanson arabe7.

Il fait bien beau aujourd'hui... Ce soleil semble m'ap-peler à Bade. Mercredi soir j'arrive... Qu'y trouverai-je? Ahl que cette attente est pénible!

J'ai attendu jusqu'à 1 heure - je ne sais quoi par exemple... Maintenant je vais expédier cette lettre - et je vous en écrirai une demain à Garlsruhe8. J'espère avoir des nouvelles demain matin.

Il y a dans "Le Nord" (dans une revue des théâtres) quel-ques mots très élogieux sur votre "Orphée" à Carlsruhe: on parle aussi du "Prophète"9.

Je suis trop inquiet pour ajouter quelque chose encore à cette lettre; je dis mille choses à tout le monde - et je vous serre les mains de toute ma force.

Der Ihrige

J. T.

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