Адольфу Де Сиркуру - Письма (Июнь 1867 - июнь 1868) - Мемуары и переписка- Тургенев Иван Сергеевич

6 (18) апреля 1868. Баден-Баден

Cher Monsieur, Hetzel a dû vous remettre un exemplaire de "Fumée", corrigé et revu par moi, car la traduction que vous aviez lue et qui vous avait, fait m'écrire une lettre si charmante fourmillait de fautes1. Je me sens tout confus à l'idée que je ne vous ai pas répondu de suite; j'espérais vous rencontrer à Paris pendant le court séjour que j'y ai fait et vous remettre mon volume moi-même; depuis mon retour à Bade, j'ai été plongé dans tous les affanni d'un changement de domicile; enfin, me voilà installé et je me hâte de m'acquitter de ma dette.

Ce que vous me dites de mon petit roman m'a fait le plus grand plaisir. Je connais votre bienveillance et l'art aimable que vous avez de "lire entre les lignes", de compléter la pensée de l'auteur; mais je connais aussi votre goût aussi fin que sûr et votre jugement éclairé. Ce livre m'a fait beaucoup d'ennemis en Russie2, et j'avoue que je l'ai mérité jusqu'à un certain point t mon misanthrope a une amertume qui va trop loin peut-être; pourtant je crois que le résultat général peut-être utile, et, si mon nom en a souffert, eh bien! je répéterai (si licet parva componere magnis)3 le mot des gens de 93.

Vous avez la bonne habitude de venir chaque année à Bade; j'espère que vous en ferez autant cette fois-ci et que vous nous donnerez un peu plus de votre temps. Vous entendrez de la bonne musique chez Mme Viardot et nous aurons de ces bonnes causeries qui me laissent toujours cet "aiguillon" dans l'âme dont parlent les Anciens, Je dis ïout cela dans la prévision que la France, tout en s'armant jusqu'aux dents, voudra bien se tenir tranquille; car, enfin, si l'on ne peut plus dire qu'on ne tire pas un coup de canon en Europe sans la permission de la France, dès qu'il en part un, sa main a été sur la mèche. Enfin, espérons encore. On fait ici des préparatifs brillants qui prouvent une confiance absolue4.

Je fais un court voyage en Russie et je serai de retour ici dès la fin de juillet. En attendant le plaisir de vous revoir, je vous serre bien cordialement la main et vous prie de croire à la sincérité de mes meilleurs sentiments pour vous.

J. Tourguéneff.

P. S. Je ne sais si j'ai bien mis l'adresse. Veuillez me a donner complète.

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